Les techniques du yoga pour combattre les sentiments négatifs (peur, tristesse, colère) dus aux actes terroristes.
Après les évènements du 13 Novembre 2015 à Paris, chacun a été touché de près ou de loin par cette violence qui donne naissance à des sentiments négatifs.
Nait en chacun la peur par un sentiment d’insécurité, la tristesse par un sentiment de perte et de deuil, la colère d’un sentiment d’injustice, donnant eux-mêmes naissance à d’autres sentiments négatifs : la crainte de l’autre et les sentiments xénophobes, l’hystérie ou encore la psychose, …
Médias et réseaux sociaux dans un flots d’images et de vidéos, débats dans un excès de mots, discussions partout pessimistes, commémorations à répétition avec ce besoin de démonstrations patriotiques qui ne sont que des revendications identitaires qui ne font que gonfler l’égo, … tout ça n’a qu’une seule conséquence dévastatrice : la surenchère émotionnelle.
Le yoga est à l’extrême opposé de tout ça : apaisement et attitude positive, méditation par l’écoute de soi et non des autres, lâcher-prise, considérer le moment présent, humilité et destruction de l’égo. Voici donc des outils issus du yoga, quelques techniques simples pour vous nettoyer émotionnellement :
I – Introduction
« L’esprit au dessus de la matière » – Le corps (soma / charira) et le mental (psycho /chitta) sont interconnectés. Les mauvaises pensées influent sur le corps, mais travailler sur votre corps vous transformera mentalement. Ne sous-estimez jamais cette notion simple à appliquer dans votre quotidien.
Dans notre corps, le siège de nos émotions est double : notre cerveau avec notre mental et notre ventre, surtout nos intestins, notre deuxième cerveau. Si vous travaillez sur ces organes, vous pourrez « nettoyer » ces sentiments négatifs.
II – Nauli – le Nettoyage du Ventre
Voici un exercice que vous pouvez pratiquer n’importe quand, même si il est préférable de le faire le matin à jeun. Ce ballotage du ventre, qui porte le nom de Nauli (nala en sanskrit cordon ombilical / nali en sanskrit récipient tubulaire, veine ou nerf du corps) est répertorié dans les nettoyages (kriyas) du yoga.
Il consiste, dans une rétention poumons vides, à rentrer le ventre en remontant le diaphragme dans un premier temps, puis plus tard à force de pratique de produire un mouvement rotatif de la partie centrale de l’abdomen.
Nauli fait partie de ces pratiques légendaires dont l’énumération des bienfaits remplissent les pages des anciens textes de Yoga : ce massage vigoureux des organes situés dans la région abdominale (estomac, intestins, foie, rate, pancréas et vésicule biliaire, vessie) élimine l’indigestion, soulage la constipation et diarrhée, l’acidité, les flatulences, la dépression, les déséquilibres hormonaux, les troubles sexuels et urinaires, le manque d’énergie et les troubles émotionnels, tonifie rapidement les muscles abdominaux, les nerfs, les intestins, les organes urinaires et excréteurs / la pression du diaphragme sur poumons et coeurs : retire l’air visé des poumons vides et ainsi les nettoie, stimule le cœur et la circulation sanguine et donc l’irrigation cérébrale / Il équilibre le système endocrinien, renforce la volonté en atténuant l’ennui et la paresse … et enfin le chakra du nombril Swadhisthana est relié au nez – la pratique de Nauli débouche les fosses nasales par pression lymphatique.
En pratique : Prenez une inspiration profonde, suivi d’un expire pour vider les poumons. Les poumons vides, rentrez le ventre et contractez de façon à avoir cette impression que l’estomac remonte dans la cage thoracique. Restez ainsi quelques secondes puis relâchez. Vous pouvez le pratiquer sur une série de trois à cinq fois. Préférez le faire le matin à jeun.
III – Le soufflet – nettoie ventre et cerveau
Appelée Bhastrika, qui signifie soufflet – la respiration faisant le bruit d’un soufflet à cheminée. Le terme Bastri fait aussi référence à ce pranayama.
Vous pouvez le faire à n’importe quel moment de la journée mais préférez le pratiquer sans avoir trop manger avant. Il consiste à respirer en engageant les muscles en fond de gorge, comme pour Ujjayi, et de respirer par à-coups en engageant le diaphragme, comme Khapalabhati.
Là encore les bénéfices sont nombreux : Purifie l’ensemble du corps en retirant le stress, l’anxiété. Exerce une action régénérante sur l’ensemble du corps. La circulation sanguine est stimulée par pressions sur toute la région cardiaque. Purification du système respiratoire (Expectorant. Purification des bronches par rejet de l’air résiduel des poumons (air vicié) et CO2). L’accroissement du flux sanguin dans le cerveau et l’augmentation de l’oxygène dans le sang améliore la mémoire, rend plus vif, bénéfique aussi pour la vue et l’audition. Activation de la digestion par pressions sur l’estomac. Stimule aussi la paroi abdominale et les intestins (on dit que c’est un bon exercice pour perdre du poids.) Renforce les reins. Tonifie le système nerveux neurovégétatif et réoxygène le cerveau, ce qui apaise le comportement. Active également le thymus dans la poitrine, très bon pour le système immunitaire et la confiance en soi, par rapport au chakra Anähata, du plexus solaire.
En pratique : A genoux fermés. Il est toujours conseillé de commencer avec une réserve d’air dans les poumons donc commencer par un inspire simple. Puis lentement vous allez enchaîner les expirations et inspirations lentes par le nez ou la bouche pour les expires, avec engagement de la gorge (à l’inspiration et à l’expiration) et une forte contraction du diaphragme pour continuer une respiration dynamique. Faire 2 à 5 séries (de 10 à 30 respirations chacune).
Attention : Très efficace et complet mais à pratiquer avec modération, peut s’avérer dangereux si il est pratiqué trop longtemps. Des étourdissements ou saignements de nez ont été souvent observés donc prudence.
IV – La respiration alternée – rééquilibrez votre mental
Appelée Nadi Shodana ou Nadi Shogana qui signifie le nettoyage ou la purification des nadis (faisant référence aux nadis pingala à droite et ida à gauche) mais aussi Anuloma Viloma qu’on peut traduire par « courant et contre-courant » et donc « va et vient ». Vous pouvez aussi trouver le terme Sukha Purvak – Sukha signifiant agréable et confortable et Purvaka « qui s’exécute avant les autres pratiques », soit l’introduction plaisante.
Pour rappel : votre hémisphère droit est le réceptif, il gère émotions, intuitions, créativité, et votre hémisphère gauche est l’actif, il gère langage, gestes, coordination. Chacun étant relié en tir croisé au côté opposé du corps, votre narine droite est relié à l’hémisphère gauche et vice versa. Vous ne respirez d’ailleurs jamais à la même intensité sur vos deux narines, toutes les 60 à 80 minutes, vous changez de dominante. La respiration alternée permet justement de rééquilibrez l’activité à égalité des deux hémisphères de votre cerveau.
Après un choc ou sous une anxiété trop grande, il arrive que le cerveau reste en activité dominante sur l’hémisphère droit, celui de l’émotion – face à la peur il n’est pas rare d’ailleurs que l’activité du cerveau droit empêche le cerveau gauche d’agir, c’est pourquoi beaucoup de gens sont dans l’incapacité de bouger.
Les bénéfices sont considérables ici pour le cerveau : Ramène à un équilibre mental, améliorant ainsi la coordination de la motricité et l’apaisement émotionnel. Prépare à un état propice à la méditation et améliore fortement le sommeil. Réduit considérablement le stress et l’anxiété par l’oxygénation du sang et des organes qui calme le système nerveux. Régulation de la thermogenèse.
En pratique : Assis. Main droite en pratique sur visage, main gauche en « compteur ». Dans la culture orientale, indienne comme arabe d’ailleurs, ces pays où la chaleur entraine des taux bactériens important et l’eau peut être rare, on adopte le concept d’hygiène suivant : la main droite est utilisée pour le visage, pour manger par exemple, tandis que la main gauche sert pour les pratiques à risque sanitaire et donc on ne la porte jamais au visage.
La main droite est en Shiva mudra (point fermé avec seulement pouce et annulaire/auriculaire sorties) et la main gauche en « compteur ».
Visage + Main droite :
Inspirez par les deux narines puis …
Bouchez la narine droite avec le pouce de la main droite
Expirez par la narine gauche jusqu’à poumons vides, puis inspirez toujours par narine gauche jusqu’à poumons pleins
Rétention poumons pleins
Changez en retirant pouce de la narine droite et appliquez annulaire/auriculaire sur la narine gauche
Expirez par la narine droite jusqu’à poumons vides, puis inspirez toujours par narine droite jusqu’à poumons pleins
Rétention poumons pleins
Changez de nouveau les doigts
Bouchez la narine droite et expirez par la narine gauche, puis inspirez, rétention
Changez
Bouchez la narine gauche et expirez par la narine droite, puis inspirez, rétention
…
Quand vous avez bouché narine droite, puis narine gauche, avec expire et inspire de chaque côté, vous avez alors fait un cycle de respiration, soit les deux narines. Quand vous revenez au pincement de la narine droite avec le pouce de la main droite, vous considérez un cycle de respiration et vous pouvez compter une phalange sur la main gauche. Une phalange correspond à un cycle de respiration (narine gauche expire/inspire + narine droite expire/inspire).
Rappelez-vous qu’à chaque narine on commence par l’expiration suivie de l’inspiration. En Occident nous avons pour coutume de dire « inspirez, expirez », en orient c’est le contraire : on expire pour mourir et on inspire pour revivre, c’est le souffle symbolique de la réincarnation. D’un point de vue pragmatique, cela vous permet de faire les rétentions poumons pleins et non le contraire pour ne pas mettre le corps en état de stress.
Main gauche :
Avec votre pouce vous compterez les phalanges de vos quatre doigts restants : index, majeur, annulaire et auriculaire, soit 3 phalanges x 4 doigts = 12 phalanges. Comme on peut le faire avec un chapelet. Vous pouvez compter de haut en bas et de bas en haut de l’index à l’auriculaire. Cependant apprenez que le comptage traditionnel se fait en spirale soit : index 1,2,3 majeur 3 annulaire 3, auriculaire 3,2,1 annulaire 1, majeur 1,2 et enfin annulaire 2.
A chaque cycle de respiration – narine + narine gauche – vous comptez une nouvelle phalange. Quand vous avez fini vos douze cycles, reprenez la respiration avec les deux narines. Puis adoptez la position de repos.
V – Le travail sur le mental
Avant de travailler sur le corps à travers les asanas, tout(e) yogi(ni) a pour obligation de passer par le mental à travers une forme de discipline morale – Yama et Niyama.
Cette première étape, Yama, propose à notre conscience de considérer et d’accepter en soi cinq notions simples. Tentez ainsi de les observer et les appliquer le mieux possible dans votre mentalité, puis votre conduite :
1 – Ahimsa – la non-violence dans nos actes comme dans nos propos, afin d’éviter au maximum de faire du mal, car heurter l’autre revient toujours à se heurter soi-même.
2 – Satya – la notion de vérité qui exclue le mensonge et le refus de considérer ce qui est avéré. Il oblige aussi à rester ouvert d’esprit sans s’engouffrer dans une vérité unique.
3 – Asteya – la notion de respect, car celui qui veut être respecter doit commencer pas être respectueux de tout et de tous, ce qui ne signifie pas » tout tolérer », il faut donc savoir accepter ou ignorer pacifiquement.
4 – Brahmacharya – la notion de modération : dans son comportement en contrôlant ses actes, humeurs et propos et donc ses pensées.
5 – Aparigraha – la notion du non attachement au matériel, ainsi même si ces terroristes utilisent une forme religieuse pour asseoir leurs actes, ne tournez pas le dos à votre propre spiritualité ou ne rejetez pas les autres pour un choix religieux.
Bien sûr, l’être humain a ses failles. Il faut du temps bien sûr pour intégrer, toujours. Souffrir du poids de la discipline ou de subir le poids du regret : à vous de choisir.
VI – Méditez
La Méditation est une bonne technique pour calmer le mental – elle va surtout vous permettre de vous couper du moment afin de vous mettre pour quelques minutes hors du temps et voir même de l’espace. Vous pouvez ainsi considérer les actes et propos avec détachement. C’est une forme de lâcher-prise.
Vous pouvez également méditez sur la notion du deuil, et ce à travers « les cinq phases du deuil selon Kübler-Ross ». Relisez ces cinq phases, voyez celles dans laquelle vous êtes peut-être encore et comment arriver à la fin de ce processus pour s’en libérer :
1 – Choc, déni : courte phase qui survient lorsqu’on apprend la perte, période plus ou moins intense où les émotions semblent pratiquement absentes, avant que la réalité de la perte s’installe.
2 – Colère : sentiment fort qui peut s’accompagner de la culpabilité, parfois aussi de questionnements.
3 – Marchandage : Phase faite de négociations avec soi-même.
4 – Dépression : phase plus ou moins longue du processus de deuil qui est caractérisée par une grande tristesse, des remises en question, de la détresse. Les endeuillés dans cette phase ont parfois l’impression qu’ils ne termineront jamais leur deuil car ils ont vécu une grande gamme d’émotions et la tristesse est trop forte.
5 – Acceptation : Dernière où la réalité de la perte est beaucoup plus comprise et acceptée. L’endeuillé peut encore vivre de la tristesse, mais il a retrouvé son plein fonctionnement. Il a aussi réorganisé sa vie en fonction de la perte.
N’hésitez pas à méditer afin de prendre du recul, de considérer le moment présent en acceptant de laisser au passé ce qui appartient au passé, de reconsidérer votre place dans ce monde, car oui vous êtes un(e) citoyen(ne) de ce monde.
Pour conclure …
Le yoga n’a pas de Dieu mais le yogi a une spiritualité ce qui lui confère une ouverture d’âme et d’esprit supérieure puisqu’il est en lien (traduction même du mot yoga) avec le Tout.
Ainsi il se doit de ne pas juger l’autre, de relativiser sans cesse en tentant d’accepter tout le monde sans préjugé ni obligation, tout étant en lien avec une force qui le transcende.
Les armes du yogi, combattant(e) bien-veillant(e), ne sont pas tournés vers les autres mais vers lui-même. Son seul combat est une lutte en introspection, dans ses failles et son intimité propre. Un combat avec son propre corps, son âme, ses pensées … et non « contre ».
Il n’a pas pour conviction de combattre les pensées ou comportement des autres qu’il doit juste observer. Il peut tendre la main et proposer de transmettre son savoir du yoga. Il peut aussi (comme je l’ai fait il n’y a pas si longtemps) ignorer celui qui ne propose que propos négatifs, conflits et les idées d’un conditionnement inébranlable. Ne perdez pas votre temps à tenter de changer ceux qui ne peuvent ou ne le veulent pas. C’est en travaillant sur soi-même qu’on travaille sur le monde qui nous entoure, et non l’inverse.
Continuez à vivre pleinement, à honorer cette force de vie comme on honore la mort, qui est de toute façon omniprésente dans notre monde.
Enfin nous pouvons rappeler ici une chose essentielle : yoga signifie unir, mettre en lien. En vrai yogi(ni) restons unis, dans l’esprit comme dans nos coeurs. Acceptez la fatalité de la vie. Le bien du monde commence par le bien intérieur de chaque être. Namasté.